Châteauvallon 1972

[NdW : Où l'on peut vérifier si besoin que Magma avait ses détracteurs...]

Châteauvallon 72 (du 19 au 27 août), seul festival de l'été : neuf nuits de musique en plein air, dans un théâtre circulaire entouré de pins ; une grande concentration de freaks en quête d'émotions fortes et de communication ; un programme éclectique où le jazz moderne côtoyait le free-jazz, les formules musicales free-pop, etc... Plus précisément et surtout : Art Blakey's Orgy In Rhythm, Jean-Luc Ponty, Tony Williams, John McLaughlin's Mahavishnu Band, le duo Marion Brown-Steve McCall, Charlie Mingus, Michel Portal, le CTI Summer Jazz, Magma, Don Cherry New Researches, Paul Bley Synthetizer Show...
(…)
Le CTI SummerJazz avait joué trois heures. C'était trop pour un public venu dans sa moitié pour Magma qui lui succédait.
Magma qui se veut (et tout est fait pour en persuader les musiciens qui le composent) le grand groupe européen, celui qui réinvente la musique occidentale et qui lui rendra sa splendeur. Prétention et bouffonne boursouflure d'orgueil que leur manager Gomelsky viendra étaler, avant le passage du groupe, sur la scène. Pour valoriser Magma, Gomelsky parlera avec mépris des musiciens du CTI Summer Jazz "qui font de la soupe alors que ceux de Magma ne se feront jamais récupérer". Suivront des propos ridicules du genre "l'Art et la Politique ont des rapports... nous sommes, nous, pour la politique du bon goût". Le reste, le passage du groupe : une musique "pompier", puisée dans tout le patrimoine de la musique occidentale et "personnalisée" à l'aide du Kobaïen : des formes primaires sans vie, à basse d'effets grossiers et qui font illusion par la mise en scène qui les entoure : "le mythe" Vander, le Kobaïen, le costume de scène et les "commandos" de persuasion disséminés dans la salle et à la sortie. Dans le groupe, d'excellents musiciens : le saxophoniste Jeff Seffer (qui le quitte d'ailleurs), Teddy Lasry, ou Vander lui-même. Mais pour le reste, une musique de "bad trip". Ils ont pourtant leur public qui resta jusqu'à quatre heures du matin. (…)

Rock & Folk n° 69 - Octobre 1972

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