MAGMA
"Attahk"
Rock Hebdo - Septembre (?) 1978Produit par Laurent Thibault qui fut le premier bassiste de Magma et qui préside aujourd'hui aux destinées du studio d'Hérouville, cet album de MAGMA aura de quoi dérouter certains. Je veux parler des sept ou huit dizaines d'aficionados fanatisés qui n'ont trouvé jusqu'ici dans la musique de Vander que « le défouloir » nécessaire à leur conscience insatisfaite de nazillons d'opérette. La musique de Magma n'a jamais été cela, mais plutôt l'expression d'une énergie positive axée vers le surpassement de soi-même. Cette sorte de philosophie est vieille comme le monde et a donné parfois des résultats dépassant l'imagination ; tout dépend de la positivité des énergies que l'on déploie et croyez-moi celles de Vander sont on ne peut plus positives. Ce qui me plaît et me fait profondément plaisir dans cet album c'est qu'il n'y a pas UN SEUL instant de flottement, pas un seul instant où l'on sent l'énergie se disperser, pas un seul moment où le feeling s'effiloche, pas un seul temps mort ; si l'on devait calculer le prix d'un album non pas en fonction de critères économiques pré-établis mais en fonction de sa richesse d'expression, de sa qualité d'interprétation ce disque coûterait une fortune. Le son est quasiment un son « Live », c'est-à-dire qu'il me semble avoir été travaillé pour être le moins sophistiqué possible comme si Vander voulait que l'on s'attache uniquement à sa musique brute et abrupte, sans que l'esprit soit dérouté par une quelconque remarque extérieure. Autre fait notable, les morceaux ne dépassent pas sept minutes ce qui est tout de même pour Magma une certaine nouveauté ; du reste le morceau le plus long s'intitule « The last seven minutes » (1970-77, phase I), et dure sept minutes comme si chaque minute de musique qui s'écoule représentait un an de la vie passée du groupe ; je ne veux pas décrire cette musique, elle est trop belle, trop puissante, trop riche, elle est au-dessus de toutes les éloges, elle encercle trop l'esprit et pose trop de questions et de jalons, mais je ne peux tout de même m'empêcher de vous parler de deux titres qui à mon avis surpassent un peu le reste. Tout d'abord « Dondaï ». Si mes souvenirs sont bons « Dondaï » en Kobaïen est synonyme de sérénité et je dois avouer qu'effectivement je n'ai jamais tant ressenti à travers une musique une telle paix, une telle tranquillité d'esprit ; le piano commence, seul, puis Vander se met à chanter, comme lui seul sait le faire, ce Kobaïen qui peut être terrible mais qui sait aussi se faire merveilleusement serein et beau ; la voix monte dans les aigus, atteint le firmament, puis des chœurs féminins viennent susurrer sans mièvrerie le titre du morceau, qui se développe, monte un .peu en intensité, les chœurs s'implantent et s'affirment, la batterie soutient le tout métronomiquement, la voix de Vander divague, les claviers, en retrait jouent un contre-chant céleste, c'est d'une beauté inavouable, secrète, que l'on a envie de garder jalousement pour soi. Ensuite « Nono » le morceau qui termine la face 2 et le disque. Quelle est la raison qui me fait aimer ce titre un peu plus que les autres ? Je ne saurai l'expliquer honnêtement car en fait tout cela se passe au niveau des feelings de chacun ; mais une des raisons que je qualifierai de « matérielle » est que « Nono » me semble un morceau du « renouveau » Magma ; c'est-à-dire qu'il possède toutes les qualités de l'œuvre précédente de Vander tout en ayant un air de jeunesse particulièrement attirant. Du reste ne s'intitule-t-il pas « Nono » ; 1978: phase II ? Ce qui laisserait supposer que Magma s'ouvre vers une nouvelle ère.
Inutile de vous dire que je vous engage vivement à faire connaissance avec cet album, ne serait-ce que pour écouter enfin une musique nouvelle qui ne tombe pas dans les affres de la « recherche » et qui offre une palette de couleurs extraordinaires.