Steve Davies et Interesting Promotions présentent Magma. Improbable ? Si ! Ce Steve Davies, celui qui les a vus jouer il y a 14 ans à la Roundhouse et qui depuis achète tous leurs enregistrements.

Magma n’est pas seulement un groupe intéressant, il défie l’entendement. Leur principale influence est Carl Orff, le compositeur de Carmina Burana (la musique de la pub pour l’après-rasage surf). Ils ont eu pour habitude de se balader en arborant leur sinistre logo en forme de griffe d’araignée sur leurs gros médaillons autour de leurs cous tout en distillant une intensité Teutonne qui ferait passé Laibach pour de la rigolade. Ils chantent dans une langue totalement inventée et ont vendu plusieurs milliers d’albums relatant une vaste saga intergalactique à côté de laquelle l’Epopée de Gilgamesh ressemble au numéro annuel de Beano.

Magma arrive avec un enregistrement présentant un vent violent, de sinistres cloches sonnant le glas et… serait-ce Bugs Bunny jacassant derrière ? Lorsqu’ils arrivent à pleine puissance, à 12, l’extraordinaire voix soprano de Stella Vander s’élance dans un scat d’opéra. Mais rien ne vous prépare à Christian Vander. Ressemblant au grand frère de Fish, plus petit, plus rond, serré dans une combinaison à paillettes avec une petite cape à la batman, Vander lance des regards furieux et gesticule comme s’il tentait de retirer une dague enfoncée dans ses reins. Ses vocalises sont extraordinaires- un débit rapide, des explosions de voix, tel un Finn se gargarisant de bain de bouche tout en imitant Van Morrison.

La toile de fond de ce gâteau intergalactique n’était pas moins intéressante, avec l’arrivée d’un gros homme chauve portant une cape de Dracula, hurlant et quittant à nouveau la scène, ainsi que la silhouette habillée d’une coiffe telle une pomme de terre dorée avec des germes et qui a livré un sermon en français sur le fait d’être Maître de la Vérité et de la Lumière ainsi que quelque chose à propos des fleurs que je n’ai pas compris.

Musicalement, c’était encore plus intéressant. Quelques touches des années 70, comme l’éternel solo de batterie, la flûte perçant les tympans, l’obligatoire Morceau Qui Sonne Comme Weather Report, et un sympathique et jovial solo de basse. Il y a eu quelques puissantes et impressionnantes fanfares Orffiennes et l’inattendu « A love supreme » a surgi, quelques bribes de gospel désespérés. Des passages ennuyeux, des passages cosmiquement atroces, et des passages inspirés. Je n’aurais manqué ça pour rien dans la galaxie.



Zïha Morgane pour la traduction

The Guardian - Janvier 1988


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