Il va bientôt falloir tous se mettre au Kobaïen, cette langue martiale et terrorisante inventée par Christian Vander pour distinguer encore plus la musique de Magma de tout ce qui s’était fait précédemment sur cette planète. Car, après avoir longtemps incarné une sorte de repoussoir prog aux yeux de beaucoup, Magma semble connaître le même regain d’intérêt que pas mal de hérauts du krautrock dont ils sont à l’évidence les cousins. On s’engouffre désormais sans crainte à travers les portes que ces barbares ont ardemment défoncées au cours de la décennie 70, certains de trouver, sinon la lumière, au moins des pistes transversales uniques entre le rock et le jazz, le primitivisme et la musique savante, Stravinski et Soft Machine.
Inconsolé par la mort de John Colrane, Vander fonde dans la traînée de 68 ce groupe avec un seul mot d’ordre : « faire une musique de sauvage ». Mission déjà accomplie avec un (double) premier album en 70, dont la cible centrale, Kobaïa, résonne toujours comme l’un des actes insurrectionnels les plus fort d’une époque qui n’en manquait pourtant pas. Même leur folklore esthétique inspiré par la science fiction oppressive et leur sabir un peu « KommicK » influence aujourd’hui quantité de factions dans les sphères de la musique expérimentale la plus rude, tels Sun O))) ou Guapo, fascinés par leur opacité de secte apocalyptique.
Pour Noël – mais est-ce raisonnable un cadeau ? – sort un coffret de l’intégrale des enregistrements studio du groupe, soit neuf albums et un double CD d’inédits, essentiellement concentrés sur la genèse sonique du Zeuhl, ce « matériau spirituel en vibration » que Vander à mué en forme de musique.
Ingurgiter ce magma sonore d’une traite est l’assurance d’un aller simple pour l’hôpital psychiatrique. On peut en revanche tenter l’expérience par paliers, forcement s’attarder sur ses débuts où l’ensemble joue aussi compact que son nom en fait la promesse, ou s’embarquer dans les méandres obsessionnels de Mëkanïk Destructiw Kömmandöh, sorte d’oratorio profane de 1973 où le chant halluciné de Klaus Blasquiz est entouré d’un chœur venu tout droit des enfers. Si on comprend pourquoi cette musique sans arnaque continue de remuer certaines consciences aventureuses, il n’est pas interdit en l’écoutant d’avoir à la longue une sacrée envie de (ko)baïller
Coffret intégral spécial 40ème anniversaire 12 CD(Seventhe Records /Chant du Monde), Albums disponibles individuellement à partir de Janvier.
En tournée : 30/1 Toulouse, 12-14 Paris, Casino de Paris, 21/2 Joué les Tours, 10 /3 Lille, 27/3 Eysines, 28/3 Foix, 2/4 Reims, 4/4 Corbie, 29/4 Lyon, 30/4 Clermont Ferrand, 1/5 Bourg les Valence, 6/6 Caen.Christophe Conte - Volume - Décembre 2008
Zïha Jean Christophe Alluin