Une nuit de sabbat

Magma, plus que jamais, a fait la preuve de sa différence à L'Autre Canal. Quarante années d'impertinence revisitée live.

D'abord lui, Christian Vander, depuis longtemps légende pour une vaste chapelle et rejailli au sommet de l'actualité au terme de quarante années de bons et loyaux services à la musique qu'il a dérangée, sortie des habitudes, dépoussiérée.

Le chœur agissant et tellement singulier d'une étrange et, pour beaucoup dérangeante, épopée aussi novatrice qu'en dehors du temps. Installé au centre de la scène, entouré de son incroyable batterie dont il caresse les peaux et fait vibrer les cymbales comme un amant au sommet de la passion pour, l'instant venu, les maltraiter avec la même ferveur, hier encore, il est venu rappeler comment il n'avait pas seulement fait voler en éclat les barrières entre les genres mais créé une charge explosive dont les composantes n'étaient autres que jazz, rock et classique.

Une révolution venue bousculer les années 70 pour se poursuivre aujourd'hui encore.
Le public nancéien, comme celui du Casino de Paris, a eu la primeur de «Feliciteth’z»,1'un des morceaux phares d'un futur album annoncé pour juin.

Epopée novatrice

Au programme figuraient également «Mekanik destruktion Kommando » et le tout aussi irrésistible « Kobaïa ».

L'intensité toujours avec mise à contribution des cordes en fusion, de claviers, d'un xylophone et de ces voix qui portent une autre langue, le kobaïen, inventée pour apporter des sonorités supplémentaires, ajouter à l'aspect sacré de certaines créations...

Un parti pris que le concert d'hier soir a continué de mettre en valeur avec, pour cette partie chœur, un autre pilier de l'incroyable aventure, Stella, complice depuis toujours.



Christian Vander, plus qu'habité, possédé par la musique.

La flamme, incontestablement, est intacte, avec pour l'entretenir un Vander qui n'a cessé de se remettre en question, varier ses vibrations jusque sur scène, au risque de déplaire, pour continuer toujours sa marche forcenée vers un impossible absolu.

Flamme intacte

En préambule Jannick Top, l'un des héros de la grande «Epok» avait, à sa manière, planté le décor, démontré qu'il n'avait pas vraiment quitté les rivages de ces inspirations hors normes.


Au programme, une pièce de presque une heure, sans coupure « Infernal Machina » lancé dans un seul souffle autour de la basse démoniaque de celui qui demeure la référence dans sa partie. Là encore, le rythme constitue la base, sortie des sentiers battus, particulièrement inventive, elle se retrouve au centre d'une symphonie baroque soutenue par deux batteries, les percussions de Klaus Blasquiz, autre figure du Magma initial également préposé au chant.

Symphonie baroque

Des incantations qu'il partage avec Natalia Ermilova, troublante «nymphe» venue posée ses aigus sur le grave.

Le gimmick inspiré de la guitare n'a rien de linéaire. Il tire sans cesse vers l'intensité, montée en puissance qui ne pouvait qu'aboutir aux portes de la saturation. Quelques effets sonores parcourent ce « concept » intense dont certaines séquences prennent les allures de ces beats qui réglaient le
travail des galériens : l'histoire de l'humanité effectivement qui, si elle est passée par différentes formes, n'a jamais perdu sa charge de désespoir.

Jean-Paul GERMONVII.LE
Photos Serge LALISSE

L’est Républicain – 1er Mars 2009

Zïha Murielle Decker & Françis Lecointe

[retour 2009]

[retour page d'accueil]