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MAGMA, par Antoine de Caunes

Deux semaines plus tard, le premier concert est donné à la Gaieté Lyrique, avec le groupe Triptique, où joue Clément Bailly (batterie) que nous retrouverons sept ans plus tard. Les journaux restent prudents dans leurs appréciations. La première réaction reste une incompréhension totale de la musique. On se rattrape sur des considérations esthétiques, morales, idéologiques, créant dès le départ un malentendu dont les musiciens n'auront pas bientôt fini d'entendre parler, et que nous rappellerons le moment venu.

Comment, se demandent ces messieurs, voilà un groupe pas sage comme il conviendrait (c'est encore l'époque où les fleurs poussent comme par miracle dans les cheveux, puisque prétendument, c'est l'aujourd'hui qui chante), pas déchaîné non plus à chanter "Johnny sois bon" dans les provinces françaises, mais fou d'orgueil et de mépris. Qu'en dirons-nous, confrères ?

Les premiers textes de critique sont à mourir de rire ou de dépit. "Les Magma", comme le prononcent certains connaisseurs, inventent une nouvelle case d'esthétique rock. Il faudra donc attendre quelque temps que ces jeunes académiciens prennent le temps de bien l'ingérer pour commencer à en discourir.

Seul Philippe Paringaux (Rock & Folk n° 40, mai 1970) rédige déjà quatre colonnes enthousiastes dans son journal. "…Il y a dans Magma… ce qui va balancer en un clin d'œil tout ce que la pop française avait jusqu'à présent de traditionnel et de compassé. Magma sera la bombe qui pulvérisera toutes les conventions d'une musique qui commence à se complaire un peu trop dans le beau, quand ce n'est pas dans le joli. D'un coup de griffe féroce, d'un coup de haine. Enfin une musique qui dérange profondément, met physiquement mal à l'aise et agresse l'esprit. Magma ne peut être comparé à rien de ce qui s'est fait jusqu'à présent et surtout pas à de la musique blanche."

5 - Octobre 1970, Golf Drouot. Photo Roger HabertC'est le 19 juin 1970 que le groupe fait sa première apparition à la télévision, un dimanche à midi, juste après les bons offices religieux et avant les sacrements sportifs, dans l'émission de Denis Glaser : Discorama. Vander vient hurler le discours de Stoah, jouer le morceau avec ses complices avant de répondre aux douces et affables questions de son interlocutrice sur un ton quelque peu déplacé…

Suit une série de concerts, du Café de la Gare où la police interrompt le spectacle à cause du bruit, aux Musicoramas de l'Olympia où commence à se former un noyau d'inconditionnels.


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