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MAGMA, par Antoine de Caunes |
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Le 9 février 1975, les concerts débutent, après quatre mois de répétitions à Hérouville et à Drancy. Nouvelle tournée anglaise, très acclamée, qui précède la série de cinq concerts à la Taverne de l'Olympia où a lieu l'enregistrement du double album Live. La musique est présentée en deux parties : la première très dure servant à amener un état d'écoute possible. Klaus déclare au moment de la pause : "Voilà, c'était pour extirper les mauvaises énergies ; après l'entracte, nous allons jouer LA musique de Magma." A l'époque, Klaus et Christian sont persuadés que les gens ne peuvent pas vraiment écouter la musique Magma sans s'être débarrassés des couches obscures étalées par un quotidien médiocre. Ce jugement s'atténuera avec le temps, grâce à deux événements parallèles : à la fois la progression spirituelle des musiciens et celle du public qui s'habituera au climat Magma, pour ne plus y voir, chez certains, le support d'angoisse que peut laisser une première écoute superficielle. En France, la critique non spécialisée s'enflamme littéralement. Alain Dran, par exemple, de la République lorraine à Metz, laisse couler son flot d'éloges qui devient rapidement torrent. Si, pour lui, les références aux mystères d'Egypte ne sont pas explicites, cela ne l'empêche pas de penser que "la troublante splendeur sonore exprime trop bien certaines pulsions de l'inconscient collectif occidental, en cette fin de siècle. Pour situer cette musique avec les mots, il suffit de recourir à l'enchaînement symbolique que suggère le label "Magma" : elle est constamment parcourue d'un martèlement tellurique qui veut exprimer un rythme géologique primordial. Elle a la puissance éruptive des volcans qui ont modelé la couche terrestre. Elle coule, épaisse et traversée de luminescences glauques, tel un lourd et lent torrent de lave. Elle vous écrase comme un gigantesque monument de basalte. Peu de soli, encore moins d'improvisations : vous êtes entraîné dans un temple sonore, titanesque et baroque, aux rituels logiques autant que mystérieux." Jean-Marc Bailleux, dans Rock & Folk, insiste, dans sa critique de l'album, sur Vander : "Vander a prouvé qu'il était un des tout premiers batteurs du monde, tant par sa technique époustouflante que par sa richesse musicale (peut-être actuellement un des très très rares dont on puisse apprécier un solo sans avoir des démangeaisons au bout de dix minutes). Mais heureusement, il n'y a pas que cela, c'est un grand MUSICIEN et il a prouvé qu'à travers tous les changements de personnel qui l'ont transformé, grâce à eux et (ou) malgré eux, Magma est devenu ce qu'il est, l'un des groupes les plus importants et les plus créatifs de la musique contemporaine, c'est-à-dire l'un des plus originaux en même temps que des plus énergiques, des plus forts." C'est donc en juin 1975 qu'est enregistré le double album en public, fruit d'un travail qui se poursuivra jusqu'en septembre 1976 avec les mêmes participants. "Créer une musique qui défie le temps". Le disque est édité chez R.C.A., maison américaine. On retrouve Stella sur l'album, présente comme elle le fut depuis les débuts. De fait, présence n'est pas un vain mot, puisqu'elle est la sur de Christian. Successivement dans l'ombre ou la lumière, elle s'occupe du groupe, chante, en un mot existe, comme elle dit, pour et par le groupe. D'après ses souvenirs, Christian était aux débuts de "Magma" complètement possédé, se levant le matin en hurlant des discours kobaïens, tout animé d'une haine inapaisable (si Christian semble plus calme aujourd'hui, ce n'est heureusement qu'en apparence). Quant au python (curieuse affaire décidément!), elle s'en souvient évidemment très bien. Christian qui le promenait partout avec lui dans la poche de son manteau de fourrure (acheté pour le serpent!) prit un jour le métro en sa compagnie. Comme il faisait chaud, le doux animal, saisi d'un accès de fièvre, ou d'un simple accès de tendresse, décida d'aller s'enrouler autour du cou de son illustre propriétaire, voir si l'air y était plus frais. Il y était tant, que le wagon entier, pris d'un subit frisson, décida d'un commun accord de s'exiler vers des contrées où la main du serpent n'avait encore jamais mis le pied, comme n'aurait pas manqué de l'écrire Ponson du Terrail. |
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