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MAGMA, par Antoine de Caunes |
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3 - Découverte du Nouveau Monde Kobaïen "Car
ces noms ne sont ni les frères ni les fils, mais bien les pères
des objets sensibles." Comme dans bon nombre de traditions, le kobaïen semble remplir le rôle de "parole fécondante". A l'aube de la naissance du monde (Kobaïa), elle apparaît, avant que rien n'ait encore pris forme, et construit par sa seule force ("Au commencement était le verbe...") l'univers qu'elle amène à l'existence. Aussi folle semble-t-elle être, l'entreprise de création d'un langage a des antécédents : chez les polyphonistes du XVIe siècle ou chez Messiaen (langage des oiseaux). Tous ont un point commun : éviter l'utilisation d'une langue usée par la vie, et connotée jusqu'à l'épuisement. "Mon esprit ne veut plus marcher sur des semelles usées", dit Nietzsche. Pour Vander, la solution est là, tout en étant dépassée. D'une certaine manière, il ne "décide "pas d'"inventer" un nouvel outil de communication : celui-ci lui est "donné", en rêve ou en sursauts dépassant la conscience, et il ne fait qu'accueillir ces mots qui viennent à lui aussi naturellement que l'écume aux vagues. A tel point qu'il lui faut plusieurs mois et souvent plusieurs années pour parvenir à comprendre le sens d'un mot. A ce titre, il est édifiant de savoir que le texte de "Mekanïk Destruktïw Kommandöh" n'est pas encore, à ce jour, entièrement déchiffré. Le sens général perce sans mal de l'avalanche mais la correspondance littérale lui succède toujours. Ce ne sont pourtant pas des mots placés les uns à la suite des autres qui forment le texte ; une syntaxe et une grammaire rigoureuses les articulent, dont nous ne pouvons ici entreprendre l'explication. D'abord parce que tous les éléments nécessaires ne sont pas encore réunis (et qu'un linguiste conviendrait mieux à ce genre de travail), mais surtout parce que Vander attend le jour où il s'expliquera en personne, et à n'en pas douter, mieux que quiconque. Langage de l'inconscient, le kobaïen, vu de l'extérieur, a donc cette valeur. Dans l'esprit d'un musicien, il est une des multiples manifestations de la musique dans la partie cachée de son psychisme, et à cet égard, il mérite la même attention que la musique. Il véhicule la même force de poésie et de nouveauté. Pratiquement, le kobaïen a l'avantage d'être une langue mythique, comme le fut le latin utilisé dans la musique religieuse. Il n'est pas destiné à être employé couramment, mais à des fins rituelles, et de communication d'idées essentielles. C'est-à-dire qu'il est le rempart d'idées qu'il faut aller chercher avec le cur, et qui ne sont pas systématiquement délivrées sans aucun travail de compréhension supplémentaire. Le terme de compréhension s'accorde du reste assez mal. Il convient de lui substituer celui d'"appréhension", pour reprendre le mot de Klaus. La compréhension nécessite la logique, l'appréhension fait appel à une perception essentielle, sans rapport avec l'intellectualité, à ce mode d'échange au-delà de la sémantique et du discours qui permet de comprendre l'âme des événements aussi bien que celles des objets. Partie du cur, la langue kobaïenne a cette fois gain de cause, que la raison n'est pas près d'éluder. |
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